Retour sur la JAP 2022

Deux années se sont écoulées depuis la première écriture de cet argument. Deux années qui ont profondément bouleversé notre rapport au monde, traversé par plusieurs crises. En ce printemps 2022, et alors que la guerre fait rage en Ukraine, nous voilà d’autant plus animés par l’envie de tirer le fil de l’incertitude.

C. Castoriadis* écrivait : « Penser n’est pas sortir de la caverne, ni remplacer l’incertitude des ombres par les contours tranchés des choses mêmes, la lueur vacillante d’une flamme par la lumière du vrai soleil. C’est entrer dans le labyrinthe, plus exactement, faire être et apparaître un labyrinthe, alors que l’on aurait pu rester « étendu parmi les fleurs faisant face au ciel ». C’est se perdre dans des galeries qui n’existent que parce que nous les creusons inlassablement, tourner en rond dans un cul-de-sac dont l’accès s’est refermé derrière nos pas- jusqu’à ce que cette rotation ouvre inexplicablement des fissures praticables dans la paroi. »

Cet extrait résonne fortement lorsqu’il s’agit de penser, dans l’après-coup, ce à quoi nous confronte cette expérience de l’incertitude.

La crise sanitaire, séisme public, s’est faite entendre par des résonances ou répliques sismiques privées, dans l’intimité de nos vies et de nos liens personnels, autant que dans l’intimité de nos cabinets, institutions. Confinés dans nos cavernes, nos chez-soi, il a parfois fallu y creuser des labyrinthes pour rester en lien avec nos patients, des labyrinthes pour rester en lien avec nos collègues, nos groupalités-ressources, étayages à nos cadres internes bien malmenés. Des labyrinthes … pour continuer à penser, à être aux prises avec une vitalité, une créativité qui participerait de border cet inconnu, nos peurs, nos angoisses, celles de nos patients … pour ne pas se perdre, paradoxes ?! 

Quelles « fissures praticables dans la paroi » et autres trouvailles-créées dans nos pratiques pouvons-nous déployer et partager pour traverser cette période qui réactualise dans le réel, les menaces de déliaison, de mortalité, avec force et proximité ?

Pourtant, l’incertitude se loge au creux de nos pratiques, dans l’imprévu des rencontres, face à l’inconnue du temps nécessaire à la guérison psychique.

Incertitude encore, liée à la complexité de la psyché humaine, quelle place occupe-t-elle dans notre société avide de certitudes ?

Si notre métier nous a appris que c’était bien la certitude plus que le doute qui rendait fou (Nietzsche), que la faillibilité, la vulnérabilité, sœurs de cœur de l’incertitude, participent à la subjectivation du sujet, comment lui rendre ses titres de noblesse ?

* CASTORIADIS Cornelius (1978), Les carrefours du labyrinthe.

Nous avons le plaisir de vous partager le texte d’ouverture de cette journée, écrit par Anne Jambrésic, psychologue clinicienne, à l’Institut de Rééducation Neurologique du CHU Grenoble, intervenante en Analyse de la Pratique et présidente du C.P.C.I.

Au cœur de la relation de soin,

penser les enjeux éthiques de l’incertitude

par Elodie Camier-Lemoine, philosophe, chargée de mission Espace de Réflexion Éthique Auvergne Rhône Alpes

Du psychique au biologique,

un continuum pour penser l’incertitude

par Anna Kata-Christophe et Marie-Thérèse Morat, Docteurs en Psychologie au Centre Hospitalier Spécialisé de la Savoie

Vaciller n’est pas chuter

Heurs et bonheurs du psychologue face à l’incertitude

par Axelle Mars, psychologue clinicienne, au Centre Médico-Psychologique Enfants et Adolescents de Vizille, et au Centre d’Accueil Thérapeutique à Temps Partiel Jenny Aubry du Centre Hospitalier Alpes Isère

Au Principe, l’incertitude

par Myriam Germain : psychologue et psychanalyste en cabinet libéral et auteur d’ouvrages

Retrouvez également un peu de poésie, au fil de son écoute flottante, en cliquant ici. Nous l’en remercions vivement.